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Ce qu’il faut savoir sur la diversité des sols en Bretagne et les pressions qui les dégradent

photo de ver de terre sortant du sol

Il existe une grande diversité de sols. En Bretagne, ils sont plutôt limoneux, acides et riches en matière organique. Certaines conditions peu fréquentes ou des matériaux rares sont à l’origine de sols atypiques. Fragiles, les sols subissent des pressions naturelles et humaines qui peuvent les polluer, les imperméabiliser et les tasser.

Le sol : de quoi s’agit-il ?

Nous les foulons quotidiennement souvent sans y prêter attention. Pourtant les sols sont précieux, parfois même rares et souvent spécifiques. Ce que nous appelons sol représente 1 à 2 mètres de profondeur et correspond à un mélange organisé de particules minérales (quartz, micas, argiles, etc.) et organiques (principalement constituées de carbone, d'hydrogène, d'oxygène, d'azote, de phosphore et de soufre), d'eau et d'air.

Ce subtil mélange se forme à partir d’un matériau minéral (roche mère, sable, etc.) qui se désagrège sous l’usure du vent, de la glace et de l’eau. Pas de sol où il n’y a pas de vie. Car pour se former, un sol a besoin de l’eau, de la végétation, des microorganismes, etc. Ces derniers altèrent les roches, décomposent les résidus végétaux et animaux qu’ils recyclent sous la forme de matière organique. Enfin, les sols ont besoin pour se former de temps… beaucoup de temps ! Selon les conditions, cela peut prendre plusieurs siècles voire plusieurs milliers d'années. C’est ce qui en fait une ressource non renouvelable.

Schema pedagogique Coupe de Sol

Quelles sont les principales caractéristiques des sols bretons ?

De façon générale, ils présentent des spécificités quant à leur nature et leurs qualités physicochimiques. En premier lieu, les sols en Bretagne sont plutôt limoneux. Les particules limoneuses très fines de 2 à 50 μm forment plus de 50 % de la fraction minérale du sol, ce qui lui donne cette texture particulière. Cela favorise la rétention d’eau et rend les sols sensibles au tassement. Cette texture limite également leur potentiel de stockage d’éléments nutritifs dans la mesure où ils contiennent peu de matières organiques et d’argiles sur lesquels ces éléments peuvent se fixer.

Dans le contexte breton, deux facteurs expliquent la prédominance des limons : d’une part, l’altération des roches du socle géologique (schistes, micaschistes) par la pluie, le vent, les organismes vivants ; d’autre part, des apports éoliens de particules limoneuses qui se sont déposées au Quaternaire (- 2,6 millions d'années).

Du point de vue des qualités physico-chimiques, notons que les sols bretons sont acides. Le pH moyen est de 6,3 ce qui s’explique par le fait que la roche qui leur donne naissance en s’altérant est riche en silice, donc acide. L’acidité ralentit l’activité microbienne du sol qui se retrouve appauvri en éléments nutritifs assimilables par les plantes, ce qui peut poser problème pour un usage agricole.

Quand l’aluminium présent dans le sol devient toxique

En milieu très acide, certains éléments chimiques deviennent toxiques. C'est le cas de l'aluminium par exemple qui se trouve sous une forme qui bloque le métabolisme de la plante et la fait dépérir. La vie du sol est également ralentie : les bactéries du sol se développent mal et certaines disparaissent quand le pH est trop acide. Il y a alors augmentation du taux de matière organique, et surtout pénurie de nutriments absorbables par les plantes car la minéralisation est ralentie. Enfin, la nutrition se fait mal : le pH perturbe l'équilibre électrochimique nutritifs par la plante. 39 % des analyses de terres faites à la demande d’agriculteurs entre 2005 et 2009 ont fait apparaître des sols en dessous d’un pH de 6 en Bretagne (source : Base de données des analyses de terre, 2015). La récolte en elle-même des cultures a tendance à acidifier les sols, tout comme le recours à des engrais minéraux de synthèse. Le chaulage des sols permet de maintenir le pH à un niveau compatible avec la mise en culture.

 

Les sols bretons sont riches en phosphore, ce qui s’explique par la fertilisation minérale mais surtout les apports liés aux lisiers, fumiers, boues de station d’épuration, déchets agroalimentaires, etc. Les stocks de phosphore restent élevés dans les sols de la région. Cela n’a pas de conséquences sur le développement des plantes ni sur la chaîne alimentaire, mais sur la qualité de l’eau. Le phosphore des sols est alors transféré aux masses d’eau.

Enfin, la teneur en matière organique des sols en Bretagne est particulièrement variable d’est en ouest (entre 2,5 et 10 % dans les sols cultivés). Toutes ces spécificités déterminent les usages du sol, notamment les potentialités agronomiques.

Ces spécificités sont détaillées dans la base de données des analyses de terre (bdat.gissol.fr).

Schiste : " Roche sédimentaire (ardoise par exemple) ou métamorphique (micaschiste par exemple), susceptible de se débiter en feuillets " Silice : " Composé oxygéné du silicium, de formule SiO2, présent dans un grand nombre de minéraux, tels le quartz, la calcédoine, l'opale. " (Source : Larousse).

Aller plus loin avec des données spatiales et temporelles détaillées

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Ces collections de cartes ont été réalisées en collaboration avec l'Institut Agro Rennes-Angers. Certaines collections présentent des données depuis 1980.

Effectuer une recherche des informations dont dispose l’administration concernant une pollution suspectée ou avérée d'un site ou d'un sol (ex-BASOL).

Quels sont les types de sols les plus fréquents dans la région ?

En Bretagne, il existe une grande diversité de sols comme le montre la variété de leurs couleurs et de leurs textures. Parmi les 330 types de sols observés, certains sont plus fréquents que d’autres. Les quatre types de sols dominants couvrent environ 20 % de la région. Ce sont :

  • Des sols saturés en eau des vallées (fluviosols–rédoxisols) qui se développent dans les alluvions récentes des cours d’eau. Le réseau hydrographique étant très dense en Bretagne, ce type de sol est très courant. Plutôt saturés en eau, ces sols sont en général associés à des prairies permanentes.
  • Des sols épais issus de granite altéré (brunisols) sont souvent riches en matière organique et se rencontrent surtout dans l’ouest de la région. Ils contiennent beaucoup de sables grossiers, sont bien drainants, et leur teneur en matière organique leur confère de bonnes propriétés agronomiques.
  • Des sols moyennement épais issus de schiste tendre (brunisols) sont localisés dans les bassins sédimentaires de la moitié ouest de la région. La texture limoneuse de ces sols apporte une bonne réserve en eau, qui compense en partie leur épaisseur moyenne.
  • Des sols épais issus de limons éoliens se caractérisent par un enrichissement fréquent en argile en profondeur (néoluvisols). Sans cailloux et épais, ces sols sont faciles à travailler et ont un très bon potentiel agronomique. Ils sont cependant très sensibles au tassement et à l’érosion.

Alluvion : " Dépôts de sédiments abandonnés par un cours d'eau quand la pente ou le débit sont devenus insuffisants. " (Source : Larousse). Granite : "Roche dure, formée de cristaux de feldspath, de quartz, de mica, etc. " (Source  : Le Robert, dico en ligne).

Y-a-t-il des sols plus rares que d’autres en Bretagne ?

Certains sols sont remarquables parce que leur formation repose sur des conditions peu fréquentes en Bretagne ou parce qu’ils sont issus d’un matériau peu courant. De fait, ils ne couvrent que quelques dizaines de milliers d’hectares.

Les sols podzoliques par exemple nécessitent plusieurs conditions particulières : une roche mère filtrante et acide (sables, grès ou quartzites), une situation topographique spécifique (forte pente) et une végétation acidifiante (résineux, etc.).

Ces sols remarquables se trouvent dans des milieux naturels fragiles, très dépendants du fonctionnement des écosystèmes. Par exemple, il suffit que la végétation disparaisse sur une dune, du fait d’une fréquentation excessive ou d’un raz-de-marée exceptionnel, pour mettre les sols dunaires en danger.

Il existe aussi en Bretagne des sols très anciens qui se sont formés au Quaternaire, alors que le climat était de type méditerranéen. Ces sols sont dits paléosols. Ils contiennent une portion élevée de fer libre qui leur donne une teinte rouge. Pour cette raison, ils ont d’ailleurs été exploités comme minerai. Aujourd’hui, il en reste surtout dans le sud - est de l’Ille-et-Vilaine.

Podzol : " Sol acide, très délavé, des climats froids. " Quartzite : " Roche massive constituée de quartz en agrégats. " (Source : Le Robert, dico en ligne).

Quelle est la situation sur l’érosion des sols ?

Les sols peuvent naturellement être soumis à l’érosion hydrique. C’est-à-dire que sous l’effet du ruissellement de l’eau, ils peuvent se désagréger et des particules être emportées. Globalement, le risque d’érosion des sols n’est élevé que pour 18 % du territoire breton ; la majorité des sols a en effet un niveau d’aléa « érosion » très faible ou faible. Les sols les plus limoneux sont les plus sensibles à ce phénomène, en particulier les sols nord armoricains, où l’on trouve des cultures légumières et qui laissent les sols sans ou avec peu de couverts végétaux. Car, lorsqu’il pleut, ils ont tendance à former une croûte superficielle très peu perméable (c’est ce qu’on appelle la battance), provoquant du ruissellement.

Avec l’érosion, les sols perdent de leur fertilité de manière irréversible. L’érosion peut également être à l’origine de ravines et de coulées de boues spectaculaires. C’est un phénomène naturel, qui peut être grandement aggravé par les pratiques agricoles (sols nus en hiver, émiettage du sol excessif) et l’aménagement du territoire (suppression des haies et talus bocagers).

Pour comprendre les bénéfices du maillage bocager sur la préservation des sols, lire l’article : Quels sont les bénéfices du bocage pour l'environnement en Bretagne ?

Que sait-on sur la pollution des sols ?

L’homme contribue à fragiliser voire à dégrader les sols. Certaines activités industrielles génèrent des apports répétés de polluants. Les services de l’État engagent des actions sur les sols pollués par d’anciens sites industriels. Ces sites accueillaient notamment des usines à gaz, d’anciennes mines et dépôts de ferrailles, des activités liées aux déchets, aux hydrocarbures, au traitement de surface et à la métallurgie.

D’une façon générale, ces sites et sols pollués ou potentiellement pollués ne correspondent pas à un type de pollution industrielle spécifique à la Bretagne, ni à un secteur géographique particulier. Il est difficile de comparer les régions entre elles car elles n'ont pas le même passé industriel. Néanmoins, d'un point de vue national, la Bretagne est l'une des régions où l’on recense le moins de sites industriels pollués. Ce qui s’explique par le fait qu’elle n’a pas un passé industriel important, contrairement à la Lorraine par exemple, la région Rhône-Alpes ou le Nord-Pas de Calais où il y a plusieurs centaines de sites pollués.

En 2018, on comptait 90 sites pollués ou potentiellement pollués en Bretagne dans 55 communes, soit 1 % des sites pollués en Métropole. La majorité étaient des sites avec surveillance ou restriction d’usage.

Comprendre le rôle de l'Agence régionale de la Santé dans le suivi sanitaire des sites pollués. 

Si la Bretagne se distingue des autres régions françaises en matière de pollutions, c’est pour la gestion d’échouages de marées noires, en particulier de déchets d’hydrocarbures.

Outre les pollutions accidentelles, qui sont la plupart du temps ponctuelles, les sols peuvent aussi être pollués de façon diffuse. L’épandage régulier de matières organiques peut ainsi contribuer à apporter des éléments polluants. Parmi ces effluents, il y a les boues de station d’épuration (résidus du traitement de l’eau). Elles concernent une faible fraction des effluents répandus sur les sols mais elles contiennent des métaux et potentiellement des organismes pathogènes (virus, résidus médicamenteux). Leur épandage est réglementé. En 2013, la production de boues résiduaires de stations d’assainissement collectif s’élevait en Bretagne à 44 806 tonnes de matières sèches. 41 % ont été épandues sur des champs agricoles. Les apports répétés de produits phytosanitaires entrent aussi dans la catégorie des pollutions diffuses.

Nitrate et phosphore : ils viennent du sol mais dégradent les milieux aquatiques

La fertilisation minérale et organique en agriculture alimente le sol en azote et phosphore. Ces éléments nutritifs sont indispensables à la croissance des végétaux. Et, même à de fortes concentrations, ils n’ont pas d’impact négatif connu sur le développement des plantes, ni sur la chaîne alimentaire du sol. En revanche, en excès, ils rejoignent les milieux aquatiques et provoquent leur eutrophisation, c’est-à-dire l’accumulation excessive d’éléments nutritifs dans l’eau qui perturbe la vie aquatique et s’accompagnent de proliférations d’algues macro et microscopiques avec des enjeux sanitaires (cyanobactéries, phytoplancton toxique, marées vertes).

Source : AELB, 2014

Comment l’utilisation du sol peut-elle contribuer à le dégrader ?

Certaines pratiques d’aménagement du territoire ont un impact sur le sol et son devenir. Les destructions de haies bocagères fragilisent les sols et portent atteinte à la biodiversité. Le territoire breton aurait perdu 12 % de ses haies et talus entre 1996 et 2008.

Hormis lorsque des espaces verts sont créés, les aménagements (bâtiment, routes, chantiers, carrières, terrains vagues, etc.) artificialisent le sol et l’imperméabilisent. Les territoires artificialisés, c’est-à-dire les zones urbanisées, industrielles ou commerciales, etc. représentent environ 13 % de l’occupation des sols de la région en 2018.

Les pratiques agricoles, notamment le passage de gros engins, peuvent également avoir un impact sur les sols, en particulier sur l’érosion, la teneur en matière organique et le tassement. Cela peut nuire à l’enracinement des cultures et à la pénétration de l’eau dans le sol.

Que retenir ?

  • Un sol est un mélange de particules minérales et organiques, d’air et d’eau. C’est une ressource non renouvelable car il faut plusieurs siècles voire plusieurs milliers d’années à l’eau, la végétation et les microorganismes pour former un sol.

  • Il existe plus de 300 types de sols différents en Bretagne mais la plupart d’entre eux sont limoneux, acides et riches en matière organique.

  • Quatre grands types de sols couvrent environ 20 % de la région : des sols de vallées, saturés en eau, des sols plus ou moins épais formés à partir de granite altéré, de limons éoliens et de schiste tendre.

  • Certains types de sols sont remarquables dans la région parce qu’ils se sont formés dans des conditions peu fréquentes pour la Bretagne ou à partir de matériaux rares (sols très acides, sols en milieu dunaire, sols très riches en fer).

  • Pour la majorité du territoire breton, l’aléa « érosion des sols » est très faible ou faible, sauf dans quelques secteurs géographiques ponctuels en Finistère et sur le littoral Nord.

  • En 2018, on comptait 90 sites pollués ou potentiellement pollués en Bretagne dans 55 communes, soit 1 % des sites pollués en Métropole. Les sols peuvent aussi subir des pollutions diffuses et des dégradations dues à l’utilisation du sol (présence ou non de haies bocagères, artificialisation) et des pratiques agricoles (tassement par de gros engins).

photo Emmanuele Savelli
Emmanuèle Savelli
Cheffe du pôle Communication
Pôle communication
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