En Bretagne, une dizaine de territoires s'est portée volontaire pour engager un plan de paysage. Cet outil a pour but de construire un projet de territoire de qualité à partir des aspirations des acteur·rice·s locaux·cales et de la sphère citoyenne. L’État, depuis 2012, appuie financièrement et méthodologiquement le portage de plans de paysage par les territoires. L’Ademe, le Réseau des Grands Sites et l'Office français de la biodiversité peuvent aussi favoriser leur mise en œuvre.
C’est quoi un plan de paysage ?
« Le plan de paysage est une démarche volontaire, portée par une collectivité qui invite les acteurs de son territoire à repenser la manière de concevoir l’aménagement du territoire. Il s’agit de remettre au cœur du processus ce qui fait l’originalité et la richesse de ce territoire et qui par ailleurs est porteur de sens pour les populations : le paysage [1] ». Cet outil repose sur trois étapes :
1. Un état des lieux partagé des paysages et des dynamiques en œuvre ;
2. La formulation d’objectifs de qualité paysagère [2] ;
3. La mise en œuvre d’un programme d’actions qui répond aux objectifs.
Tout au long de la démarche, les différent·e·s acteur·rice·s (élu·e·s, technicien·ne·s, associations, entreprises, habitant·e·s) sont concerté·e·s afin d’identifier les problématiques paysagères et de mettre en cohérence l’ensemble des projets territoriaux et dynamiques à l’œuvre.
[1] issu du site internet de la DREAL Bretagne
[2] La définition des objectifs de qualité paysagère est devenue une obligation réglementaire pour les collectivités locales (Art. L. 350-1 C. de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages de 2016).
[2] Issu du site internet de la DREAL Bretagne
[3] La définition des objectifs de qualité paysagère est devenue une obligation réglementaire pour les collectivités locales (Art. L. 350-1 C. de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages de 2016)
Les années 1990 : émergence des études, plans et chartes de paysage
Dès les années 1990, les études, plans et chartes de paysage sont pratiqués en Bretagne. Les territoires invitent paysagistes, écoles de paysage et universitaires à explorer les potentiels des paysages afin qu’ils soient mieux valorisés. Une vingtaine d’études est recensée dans la région dont cinq sont réalisées par l’École Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage de Blois. Pour exemple, le projet de paysage intitulé « 20 propositions pour l’agglomération de Rennes » présente vingt objectifs de qualité paysagère. Dans ce cadre, l’Audiar préconise de conforter l’équilibre entre ville et campagne, d’assurer une continuité verte ou encore de valoriser le réseau des petites vallées.
[4] Agence d’urbanisme de Rennes
Avec notamment la ratification de la Convention européenne du paysage en 2006 par la France, les plans de paysage actuels sont, au-delà de l’étude paysagère, des projets portés collectivement.
- Inventaire des études et chartes de paysage depuis les années 1990
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Type de document (année) | Intitulé et / ou territoire concerné | Organisme concerné
- Projet de paysage (1993) | 20 propositions pour l’Agglomération Rennaise | AUDIAR
- Étude paysagère (1997) | Étude paysagère de l’Île de Batz | Université de Bretagne occidentale
- Étude paysagère (1998) | Opération Gâvres-Quiberon | Non connu
- Étude paysagère (2004) | Commune de Luitré | Chambre d’agriculture d’Ille-et-Vilaine
- Étude paysagère (2004) | PNR du Golfe du Morbihan | Non connu
- Étude paysagère (2008) | Étude prospective pour la mise en valeur et la protection de la rivière d'Étel | École Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage de Blois
- Étude paysagère (non connue) | Commune de Baillé | Syndicat Loisance Minette, Sage Couesnon, Sdage
- Étude paysagère (non connue) | Communauté de communes de Loudéac | Service de l’État, CAUE 22, Cideral
- Étude paysagère (2009) | La rade de Lorient. Étude prospective pour la mise en valeur du paysage | École Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage de Blois
- Étude paysagère (2010) | Belle-Île-en-mer. Étude prospective pour la mise en valeur du paysage (Tomes 1 et 2) | École Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage de Blois
- Étude paysagère (2010) | Étude de sensibilisation paysagère pour le Trégor-Goëlo | Institut géoarchitecture de Brest et DDTM des Côtes d'Armor
- Étude paysagère (2010) | Étude paysagère du Pays de Saint-Brieuc à partir des Trames vertes et bleues | Université Rennes 2
- Charte paysagère (2011) | Secteur de Vitré (RN157) | Non connu
- Étude paysagère (2011) | Baie du Mont-Saint-Michel | Aimiv
- Étude paysagère (2012) | Pays de Plouay. Étude prospective pour la mise en valeur du paysage (Tomes 1 et 2) | École Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage de Blois
- Étude paysagère (2013) | Espaces naturels de la Communauté de communes du cap Sizun | Conseil départemental 29, Conservatoire des espaces du littoral et des rivages lacustres
- Étude paysagère (2013) | Commune de Livré-sur-Changeon | Non connu
- Étude paysagère (2014) | Le pays de Questembert. Étude prospective pour la mise en valeur du paysage (Tomes 1 et 2) | École Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage de Blois
- Étude paysagère (2014) | Lac de Guerlédan. Étude prospective pour la mise en valeur du paysage (Tomes 1 et 2) | École Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage de Blois
- Charte paysagère (2014-2016) | Charte de paysage et d'architecture du PNR d'Armorique | PNR d'Armorique
- Étude paysagère (2016) | Commune de Plouha : diagnostic, esquisses et schéma d'intentions pour les sites de Gwin Zegal et Port Moguer, de la pointe de Plouha et du Palus | Alain Freytet
- Étude paysagère (2019) | Le paysage à Hoëdic, pour une approche globale des projets d'aménagement | Bastien Bonneau
Les années 2010 : expansion des plans de paysage
La carte ci-dessous donne à voir l’ensemble des plans de paysage en Bretagne. Outre Belle-Île-en-Mer, le recours à l’outil se solidifie à partir de 2013 notamment parce que l’État fait des appels à candidature.
Qui pilote un plan de paysage ?
Communément, le plan de paysage se réalise en amont des documents d’aménagement et de planification sur le territoire concerné [3]. Il naît alors de l’initiative des élu·e·s de la collectivité comme Saint-Brieuc Armor Agglomération, la Communauté de communes d’Iroise ou encore Lorient Agglomération. L’outil peut être adossé à une charte de Parc naturel régional comme c’est le cas pour le plan « campagne des transitions » porté par le PNR du Golfe du Morbihan et le plan de la Communauté de communes des monts d’Arrée qui a été co-porté avec le PNR d’Armorique.
Par ailleurs, l’ambition d’un plan de paysage peut aussi provenir d’un groupe d’habitant·e·s, d’associations, d’acteur·rice·s issu·e·s du secteur économique dans le but de contribuer « à promouvoir un cadre de vie de qualité et, notamment, remédier à des dynamiques de transformation des paysages » [4]. Dans ce contexte, ce seront les élu·e·s du territoire qui seront en charge de la démarche.
Le plan de paysage est animé par des professionnel·le·s extérieur·e·s tel·le·s que des paysagistes, médiateur·rice·s, géographies, etc. pour aider les acteur·rice·s du territoire à élaborer la stratégie paysagère.
[3] en amont d’un Schéma de Cohérence Territoriale ou d’un Plan Local d’Urbanisme Intercommunal
[4] Propos issus du document suivant : Brochure « Le plan de paysage : agir pour le cadre de vie » conçue par le Ministère de la Transition écologique et solidaire en 2017
[5] en amont d’un Schéma de Cohérence Territoriale ou d’un Plan Local d’Urbanisme Intercommunal
[6] Propos issus du document suivant : Brochure « Le plan de paysage : agir pour le cadre de vie » conçue par le Ministère de la Transition écologique et solidaire en 2017
L’unité paysagère : l’échelle de réflexion et d’action
Le Plan de paysage dépasse le champ exclusif de la connaissance des paysages qui est conduit à une autre échelle (départementale ou régionale) par les atlas de paysage. Celui-ci est défini à une échelle plus fine (une ou plusieurs unités paysagères recouvrant un territoire intercommunal) et permet donc d'envisager l'action. Le plan de paysage du PLUi du Pays d’Iroise couvre par exemple 19 communes ; Lorient Agglomération, 25 communes. Le plan de paysage du Mont-Saint-Michel s’étend sur 120 communes soit 16 unités paysagères, il s’agit là d’une exception dans les pratiques.
Au préalable, l’atlas de paysage départemental donne les premières clefs de lecture sur les paysages du territoire. Le diagnostic ensuite affine l’analyse des caractéristiques des unités de paysage et des évolutions qui sont en œuvre. La seconde étape consiste à définir des enjeux de paysage au regard des aspirations des habitant·e·s.
Un outil de médiation auprès des acteurs du territoire
Les enjeux paysagers et les objectifs de qualité paysagère qui en découlent doivent s’appuyer sur les besoins et les souhaits des populations. L’équipe pilote met en place différentes méthodes pour faire participer les habitant·e·s. Pour exemple, Lorient Agglomération organise des ateliers auprès des usagers (randonnée, pêche, chasse, etc.) afin d’apprécier leurs pratiques dans le paysage. Dans le même sens, la Communauté de communes des Monts d’Arrée et l’InterSCoT de la Baie du Mont-Saint-Michel organisent des lectures in situ avec les acteur·rice·s du territoire.
Certains innovent dans les démarches participatives, Saint-Brieuc Armor Agglomération propose en 2019 un Landscape Game pour découvrir et redécouvrir les paysages de façon ludique. Pour « Campagne de transitions », le PNR du Golfe du Morbihan en collaboration avec Télé d’ici présentent trois courts métrages qui rendent compte des savoirs locaux et aspirations des morbihannais·es.
Les cartes interactives sur le web sont aussi des outils pour faire participer les habitant·e·s tel que le propose le pays d’Iroise. L’ensemble de ces actions a pour objectif de faire émerger des débats autour des paysages du territoire. La concertation permet de définir collectivement des objectifs de qualité paysagère.
Les objectifs de qualité paysagère en Bretagne
Les objectifs de qualité paysagère ont été étudiés en détail dans trois plans de paysage : celui de la Communauté de communes des Monts d’Arrée, le plan de Lorient agglomération et « Campagne de transition » du PNR du Golfe du Morbihan. Chaque plan a une coloration en matière d’orientation. Pour exemple, dans les Monts d’Arrée, les objectifs définis ont pour but de valoriser le patrimoine paysager tandis que dans le Golfe du Morbihan, la transition écologique est la clef de voûte du plan. Celui de Lorient Agglomération fait trait d’union entre les deux.
La définition des objectifs de qualité paysagère est dépendante des caractéristiques de chaque territoire. Lorient agglomération a des objectifs en matière de préservation du littoral, d’amélioration des franges et formes urbaines. Le plan finistérien s’intéresse davantage aux paysages agricoles.
Outre les spécificités territoriales, des objectifs de qualité paysagère sont communs aux trois plans de paysage comme la préservation du bocage, la valorisation des fonds de vallées, les cheminements pédestres et le traitement des centres bourgs. Ces objectifs locaux sont, in fine, représentatifs des problématiques à l’échelle régionale. Une fois les objectifs déterminés dans un plan, un programme d’actions doit permettre leur mise en œuvre.
Au-delà du programme d’actions, un projet de territoire
Comme le montre la fiche action ci-dessous, « Valoriser le patrimoine bâti lié à l’eau », le plan de paysage a pour finalité de proposer une série d’actions. Chaque action est localisée sur le territoire, les acteurs concernés sont identifiés ainsi que le calendrier prévisionnel. Il est difficile aujourd’hui pour les porteurs de plan de paysage d’évaluer la mise en œuvre des actions sur le territoire car l’ensemble des actions implique une variété d’acteur·rice·s, de moyens financiers et humains.
Au-delà du programme d’actions, les plans de paysage ont pour vocation de consolider le projet de territoire. Pour Lorient Agglomération et Saint-Brieuc Armor agglomération - intercommunalités qui ont connu des fusions récentes - le plan de paysage permet de faire du lien entre les communes et de construire un projet collectif ou tout du moins d’identifier les ressources et aspirations sur le territoire.
Pour le Pays d’Iroise, le plan de paysage a pour vocation d’alimenter le nouveau PLUi. Le plan de paysage peut également servir d’outil de médiation pour faire dialoguer les acteur·rice·s d’un même territoire. C’est notamment dans ce contexte que les résultats du plan de paysage de la baie du Mont-Saint-Michel alimenteront le plan de gestion UNESCO.
Finalement, le plan de paysage est un outil aux pratiques et méthodes hybrides qui permet de fortifier les liens entre acteur·rice·s locaux·cales et paysages quotidiens.
Mieux comprendre
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Pour en savoir plus sur les plans de paysage
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