Dernière mise à jour le : 14 février 2018

Bilan de 10 ans de sciences participatives en Bretagne sur les raies ovipares

Après une décennie de collecte de capsules d’œufs de raies, d’abord sur les plages bretonnes puis sur l’ensemble du littoral métropolitain, l’Association pour l’étude et la conservation des sélaciens (Apecs) tire les premiers enseignements du projet CapOeRa (pour « Capsules d’œufs de raies ») dont le but est d’améliorer les connaissances sur les espèces de raies qui pondent des œufs. Alexandra Rohr, chargée de  mission, nous présente les résultats qui se dégagent pour la Bretagne et les resitue dans le contexte national.

Pourquoi s’intéresser aux raies ?

Une trentaine d’espèces de raies fréquentent les eaux françaises et certaines sont pêchées de façon importante en Europe. Pourtant, six espèces sont considérées comme menacées ou quasi menacées sur la Liste rouge française publiée en 2013 et deux-tiers des espèces n’ont pas pu être évaluées par les experts faute de données. Pour proposer des mesures de conservation adéquates, il faut améliorer les connaissances sur les populations de raies et leur biologie, en particulier leur reproduction. C’est ce qui a motivé l’Association pour l’étude et la conservation des sélaciens (Apecs) à lancer le programme CapOeRa en 2005.

 

Pourquoi utiliser les capsules des œufs de raies ?

Certaines raies des côtes françaises sont ovipares, c'est-à-dire qu’elles pondent des œufs. Plusieurs mois après la ponte, une raie miniature va sortir de chaque capsule. Après cette éclosion, la capsule vide (très résistante grâce à la kératine qu’elle contient) finit par être rejetée sur le rivage. Elle se retrouve souvent dans la laisse de mer, ce cordon situé en haut de plage, formé d’algues, de débris naturels et de déchets.

Les caractéristiques morphologiques de chaque capsule d’œuf de raie sont spécifiques de l’espèce qui l’a pondue. Les capsules sont donc de précieux indices pour identifier les espèces présentes sur notre littoral. Avec le programme CapOeRa, nous souhaitions faire un inventaire des sites d’échouage de capsules et notamment identifier des zones d’échouage massif, secteurs a priori importants pour la reproduction de ces poissons. Nous cherchions également des informations sur le cycle de reproduction (période d’éclosion en particulier).

 

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© A.Rohr (APECS)  |  Capsule d'oeuf de raie échouée en baie de Douarnenez

 

Comment avez-vous collecté ces capsules ?

Nous avons décidé de faire appel au grand public en créant un programme de science participative ludique et accessible à tous. Le programme a été testé en Bretagne et lancé à l’échelle nationale en 2008. Il est arrêté depuis 2015. L’opération a été un succès puisque 2 000 personnes ont participé (500 en Bretagne) et nous avons récupéré des milliers de capsules !

Pour observer l’évolution des échouages au cours des saisons, nous avons créé en 2010 le protocole « Sentinelles » qui suit régulièrement une ou plusieurs plages. Il est assuré par quelques particuliers mais aussi par des associations et établissements publics partenaires. Trois structures interviennent en Bretagne (sur les douze sentinelles en France) : le Parc naturel marin d’Iroise, la maison de la Rance (Dinan communauté) et le Cercle des étudiants naturalistes brestois.

Enfin, notre dernier protocole, né en 2014, a élargi le suivi « Sentinelles » à une échelle plus vaste. Jusqu’en 2017, d’octobre à avril et de manière exhaustive, toutes les plages de la baie de Douarnenez ont été prospectées.

 

Dans la région, une dizaine d’espèces différentes a été identifiée.

 

Quel est le bilan de CapOeRa après ces années d’activité ?

Grâce aux 724 000 capsules d’œufs de raie récoltées, nous commençons à en savoir plus sur les raies ovipares fréquentant le littoral métropolitain et notamment en Bretagne. Dans la région, une dizaine d’espèces différentes a été identifiée. Les plus grands nombres de capsules collectées concernent la raie brunette, la raie bouclée et la raie lisse.

Les données acquises pour la raie brunette et la raie bouclée ont été suffisantes pour réaliser des cartes de répartition des échouages de capsules. Ces dernières donnent une première idée des secteurs littoraux fréquentés par ces espèces, même si l’information reste approximative puisqu’on ne connaît pas les facteurs qui influent sur la dérive des capsules entre la zone de ponte et celle d’échouage.

Enfin, le protocole « Sentinelles » a montré que l’essentiel des échouages de capsules d’œufs de raie se situe en automne – hiver. D’après des expériences réalisées en aquarium, les scientifiques estiment qu’une raie peut pondre une centaine d’œufs par an, à raison de deux œufs tous les deux jours, et que l’incubation dure environ 5 mois. Cela correspondrait alors à une période de ponte commençant au printemps.

Pour relier ces observations à des mesures de gestion conservatoires concrètes pour les raies, il reste maintenant à comprendre le lien entre les zones d’échouage et les zones de ponte en mer et en particulier les différents paramètres qui influent sur la dérive des capsules d’œufs de raie. C’est notamment l’objectif du protocole de suivi de la baie de Douarnenez qui doit permettre de croiser les collectes de capsules aux données environnementales disponibles sur cette baie.

 

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Comment participer ?

Pour suivre les actions menées dans le cadre du programme CapOeRa, rendez-vous sur le site de l'APECS.

Dans notre agenda et sur la page Facebook Ecocitoyens en Bretagne, retrouvez les autres programme de suivi participatifs en cours dans la région, ainsi que les consultations publiques, des manifestations d’écovolontariat, et toutes les informations pour agir pour la préservation de l'environnement en Bretagne !

Auteurs : Emmanuèle Savelli (OEB)
Collaborateurs : Alexandra Rohr (Apecs)
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