Les enjeux de la gestion des déchets en Bretagne après le confinement

Pendant les deux mois de confinement, de nombreux Bretons ont fait du tri chez eux et ont mis de côté des objets ou matériaux cassés ou usagers dont ils souhaitent désormais se débarrasser. À partir du 11 mai, les gestionnaires des déchèteries s’attendent à un afflux inhabituel de déchets dont beaucoup pourraient être réemployés. Le comportement des Bretons dans les semaines à venir aura des conséquences sanitaires mais aussi sur l’ensemble de la filière qui traite les déchets. Et si ce qui semble un problème devenait une opportunité pour l’économie locale et la réduction des déchets ?
Plus de déchets et d’usagers en déchèterie, après le 11 mai ?
Alors qu’en temps normal sur l’ensemble de la Bretagne, les déchèteries reçoivent en moyenne chaque mois environ 100 000 tonnes de déchets, quelle sera la situation à partir du 11 mai ? Faut-il s’attendre à un pic des dépôts en déchèterie après 2 mois pendant lesquelles elles étaient inaccessibles et pendant lesquels les Bretons ont eu le loisir de faire un grand ménage de printemps ? La fréquentation des sites sera en tous cas très fortement impactée !
Les conséquences d’un afflux massif en déchèterie
S’il a lieu, l’apport massif de déchets en déchèterie pourrait faire peser un risque sanitaire puisqu’une forte fréquentation des déchèteries est contradictoire avec les mesures de vigilance sanitaire préconisées pour éviter la diffusion du coronavirus.
La plupart des équipements contribuant à la gestion des déchets en Bretagne n’a pas la capacité pour traiter une telle augmentation de déchets en un temps si court. Il y a donc un risque de saturation rapide de toute la filière de traitement des déchets, à commencer par les déchèteries qui constituent une étape préalable avant le transfert des matières pour leur valorisation ou leur enfouissement. Cette dernière étape est sensible puisque les sites d’enfouissement des déchets non dangereux sont par nature limités. Ils interviennent en ultime recours du traitement des déchets et de manière définitive. Il est donc nécessaire de diversifier les exutoires et de privilégier une approche « ressource » en :
- valorisant les végétaux in situ (paillage compostage) et en limitant les déplacements,
- favorisant la réutilisation et le réemploi,
- triant pour préparer au mieux le recyclage,
- n’envisageant l’élimination qu’en dernier recours.
Diversifions nos points de dépôts pour des « déchets » qui n’en sont pas
Nombre de déchets sont encore jetés dans la poubelle grise ou apportés en déchèterie alors qu’ils pourraient devenir des produits de seconde main ou être recyclés pour leur matière.
68 % d’une poubelle de déchets mélangés est constituée de déchets pour lesquels il existe des collectes spécifiques. Et 43 % d’une benne d’encombrants mélangés est constituée de déchets pour lesquels il existe des filières sélectives en déchèterie.
Les activités de réemploi social et solidaire sont présentes dans toute la Bretagne. Elles contribuent à réduire les volumes de déchets, mais également à consommer moins de nouvelles matières premières. Les produits collectés sont variés : électro-ménager, informatique, jouets, matériaux, matériel médical, textile, vélos ou généralistes. 96 % des communes en Bretagne disposent d’un site dédié au réemploi à moins de 15 km. Là aussi, la reprise des apports doit être progressive pour éviter tout engorgement et que le trop plein ne soit reporté vers les déchèteries et génère des déchets supplémentaires.
Favoriser le réemploi avant de jeter, c’est soutenir l’économie locale à la fois par le biais de l’emploi mais aussi par la vente de produits moins chers.
73 des 218 sites de réemploi proposent de la vente.
Quitte à changer de comportements, et s’ils changeaient durablement ?
Le Grenelle de l’environnement met l’accent sur la prévention et le réemploi pour réduire la production de déchets en France. Les déchets restants doivent être valorisés au maximum afin de baisser la part destinée à l’élimination. Mais la gestion des déchets en Bretagne dépend avant tout… des Bretons et de leurs comportements.
Aujourd’hui dans la région :
- la quantité moyenne de déchets ménagers et assimilés produite par chaque habitant augmente alors qu’elle devrait diminuer. Il faudrait qu’elle baisse de 125 kg/habitant d’ici 2030 pour atteindre l’objectif de réduction des déchets fixé par la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire.
- avec 64 % de valorisation matière ou organique en 2017, la Bretagne atteint presque le niveau de l'objectif 2025.
- entre 2010 et 2017, le tonnage de déchets ménagers et assimilés dont la destination primaire est l'enfouissement a diminué de 31 %, l’objectif pour 2030 étant d’atteindre le zéro enfouissement.
Si dans cette période post-confinement, une majorité de Bretons préférait le réemploi au lieu de jeter, les conséquences pour la région pourraient être multiples et notables.